mardi 27 mai 2014

Depuis Blois...




Depuis Blois



Merci la famille et les amis de nous avoir lus et encouragés par tous vos messages et gestes de sympathie .
"Bon voyage Bon-papa,bon voyage Bonne-maman...".il est 7.30 h ce mardi 22 mai...Merci à nos chers petits pour cet encouragement à partir...après tant de tergiversations pour moi...

Deux semaines de magnifiques retrouvailles familiales avec le retour de Lucie de Haïti, la communion de Siméon qui reçoit Jésus dans son beau cœur,les trente ans de Lucie avec amis et famille,les préparatifs et la célébrations des 175 ans de notre petite école de Lombise sous le soleil, avec des  activités pédagogiques pour remonter dans le temps et l'histoire de l'école,un chœur d'enfants si émouvants et tellement motivés,...les fiançailles de Thomas et Stefania dans la joie de réunir nos deux familles sous un soleil radieux comme les fiancés ...

Puis,c'est le départ mouvementé de Lucie ...À Noël , Lucie!

À cela se sont ajoutés un conseil d'administration, une AG et une réunion d'urgence  à la maison pour mettre en place le sauvetage de l'école  puisque les propriétaires nous expulsent et puis des courriers importants jusque mardi 22h...Partir ????Je décide finalement de faire mon sac à 23h et de tout confier à St Jacques et à tout le PO et les amis de l'école.

Sur le quai de la gare du Midi, un cousin, Paul , monte dans le Thalys avec nous. Quelle belle surprise...Une heure pour parler de nos familles, nos projets,le mariage de sa fille Alice, le voyage en Afrique du Sud avec Corinne,Jacques et Françoise et...mon frère Manu et Danièle rencontrés dans le même groupe de La libre Belgique. Le temps d'admirer la vieille locomotive circulant entre Zimbabwe et Botswana, les élégantes girafes et un troupeau d'éléphants prenant son bain et nous voilà déjà sur le quai de la Gare du Nord. "La famille est fière de vous!"nous dit Paul en guise d'adieu...Nous sommes émus par tant de gentillesse. Nous sommes fiers de toi aussi...Au 4 octobre pour le mariage...
Nous emporterons tous ces jeunes couples de la famille avec nous vers Santiago.

Le RER nous emmène dans la grande région parisienne, en Essonne...De la gare d'Etrechy, nous prenons à pied la direction d'Etampes. Notre sac semble bien lourd malgré tous les efforts pour réduire au nécessaire ...Il faudra encore passer à l'indispensable et puis au vital comme le conseillait un hospitalier à des pèlerins fraîchement débarqués du train à St Jan-Pied-De-Port pour gravir le col de Roncevaux...
"Le Sermon sur la montagne exprime ce qui paraît une tautologie dans notre monde dévoré de complexité : l'essentiel est essentiel,l'accessoire n'est pas indispensable. L'indispensable, c'est l'Evangile,le Message...",écrit Théodore Monod dans Pèlerin du désert...Bon, nous porterons pourtant nos quelques effets "indispensables ou non"..

Un joli chemin à travers bois et champs nous amène à l'entrée de notre première étape."où sommes-nous attendus Michel?" À cet instant, une voiture s'arrête devant nous au milieu d'un rond-point bien chargé et la chauffeur nous interpelle:" Vous êtes les deux pèlerins que mon fils attend ...descendez jusqu'à la gare et alors appelez-le".
La pluie nous arrose ...
Sur la passerelle enjambant le chemin de fer, deux hommes nous accostent et l'un se présente en souriant: "St Jacques "...quelle agréable apparition!...

Visite rapide mais appréciée de deux des quatre églises d'Etampes,ville choyée par les rois de France: St Basile et la collégiale Notre-dame du Fort...fresque renaissance de l'Ecce Homo, vitrail avec les Sybilles de l'Ancien Testament du XVI è,vitrail de la Vierge miraculeuse guérissant trois malaises dans la nef qui servait d'hôtel-Dieu au XII eme siècle,sculptures de reines de France ornant les clés de voûtes...les hospitaliers,père et fils, sont fiers de nous faire découvrir ces trésors...et le père d'ajouter avec un sourire coquin" Êtampes était une ville prospère, commerçante, comblée par les rois qui y logeaient leurs maîtresses". Quant à nous, nous logerons dans une ancienne vaste maison canoniale devenue presbytère pour deux prêtres ,lieu de réunions, d'organisation de kermesses...et aussi espace d'accueil pour pèlerins. Un pèlerin hollandais nous accompagne pour quelques courses chez le Marocain du coin et prépare avec moi une bonne ratatouille avec des pâtes ...en we spreken Nederlands met plezier voor wel slapen!

Après avoir chanté les laudes et reçu la bénédiction des pèlerins, nous déjeunons en compagnie des deux prêtres d'une petite quarantaine d'années ,l'un originaire de la Meuse et l'autre du Congo-Brazzaville : ils administrent 29 clochers...
Partis sous la pluie avec notre nouveau compagnon hollandais,nous irons de clocher en clocher,arpentant les longues lignes droites parfois bien monotones de la Beauce semée de ce beau blé qui nous procure de quoi casser la croûte :bannette ,campaillette,pain tradition...réalisées avec "l'assemblage parfaitement maitrisé de blés sélectionnés ". Ce midi,un banc le long du cimetière de Monnerville nous tend les bras au soleil...Il reste une quinzaine de km dans la glaise collante et pesante jusqu'Angerville. Nous déclamons  avec C.Peguy

Nous allons devant nous, les mains le long des poches,
Sans aucun appareil, sans fatras, sans discours,
D'un pas toujours égal, sans hâte ni recours,
Des champs les plus présents vers les champs les plus proches.

Vous nous voyez marcher, nous sommes la pié­taille.
Nous n'avançons jamais que d'un pas à la fois.
Mais vingt siècles de peuple et vingt siècles de rois,
Et toute leur séquelle et toute leur volaille

Nous sommes nés pour vous au bord de ce plateau,
Dans le recourbement de notre blonde Loire,
Et ce fleuve de sable et ce fleuve de gloire
N'est là que pour baiser votre auguste manteau.

Nous sommes nés au bord de ce vaste plateau,
Dans l'antique Orléans sévère et sérieuse,
Et la Loire coulante et souvent limoneuse
N'est là que pour laver les pieds de ce coteau...

Près de la mairie, une policière nous ouvre la porte de la petite chambre de fonction pour une personne située dans une ancienne école ...Nous nous rendons ensuite avec notre pèlerin hollandais chez le prêtre qui doit l'accueillir...point de réponses. Souffrant d'une allergie aux pieds, je me rends dans une pharmacie où on ne veut me vendre de la cortisone que sous prescription...Notre compagnon,Johan, prend les choses en main en se révélant être médecin. La pharmacienne me vend alors la pommade souhaitée.

Comme le cure n'arrive toujours pas,nous décidons d'aller souper au seul petit resto ouvert et finissons par obtenir la numéro de tel. d'une brave paroissienne,femme de l'ancien maire,qui nous rejoint avec deux paires de draps repassés à la salle de catéchisme qui jouxte l'église. C'est là que nous logerons sur la belle estrade en bois tandis que Johan occupera la chambre "municipale"...Ici maire et curé font bon ménage ...Un jeune curé en soutane viendra nous accueillir plus tard avant de se rendre à la répétition de chorale pour la fête des mères.

D'Angerville à Artenay, 31 km de blé ,de colza en gousses,d'éoliennes et de vent. Quelques bosquets et grosses fermes de moellons clairs en carré, des clochers comme des points sur des i rompent l'horizontalité du paysage. Pause pique-nique à Toury avec son église au superbe narthex gothique et ses anciens bancs fermés par des petites portes.
Nous arrivons juste à temps dans le petit bourg d'Artenay pour boire une Grimbergen avant d'assister à la messe de 18h avec quelques paroissiens heureux de tailler une bavette avec nous. Le père Stanislas,jeune et joyeux curé polonais, nous reçoit ensuite dans son grand presbytère,derrière la sacristie,  où il a aménagé outre ses salles de catéchisme débordantes de bricolages religieux, deux chambres pour accueillir des pèlerins . À 19 h,il vient nous "inviter" à dîner : délicieuse soupe aux champignons des bois et omelette avec du riz puisqu'on est vendredi...échanges savoureux sur la vie paroissiale, la Pologne et les prêtres et ouvriers polonais en France et Belgique...

Le lendemain matin, au moment de partir vers Orléans, le père Stanislas nous conseille d'aller prendre la café chez Mr et Mme Parou à Gidy...
De longues lignes droites balayées par le vent nous éreintent. Après Chevilly, une voiture s'arrêtent à ma hauteur et son chauffeur, Mr Parou, qui avait rencontré le père Stanislas la veille à un concert, me propose de faire halte chez lui pour la pause...Il rejoint les deux hommes plus loin pour les prévenir . À Gidy, nous sommes accueillis sur la place par le père Stanislas venu pour un baptême et plus loin lorsque tombent les premières gouttes chez les Parrou,couple de fermiers beaucerons retraités. Café et tarte aux pommes, enfants qui sont allés à St Jacques, fils vigneron qui s'est suicidé...JAC,bénévolat chez Emmaus et en paroisse,association de St Jacques, taille de la vigne,restauration de leur maison,potager,cours d'exégèse ...de belles occupations, une grande culture et beaucoup de générosité quand on approche des quatre-vingt ans...Comme nous ne trouvons pas de logement à Orléans,ils proposent que nous poursuivions notre route à pied sans sac et de venir nous cueillir en face de la cathédrale à 19h lorsque nous aurons fait nos dévotions ...
Nous descendons les 13 km restants,sous une alternance de pluie et d'éclaircies ,jusqu'à la Loire. Visite de la cathédrale Ste Croix étincelante de blancheur humide dans sa belle dentelle de pierres rénovées, déambulation dans le vieux quartier médiéval entièrement restauré et piétonnier et dans la rue de Bourgogne libérée autrefois par l'héroïne de la cité,Jeanne d'Arc, diaporama sur le parcours glorieux et la fin tragique de la Pucelle dans sa demeure restaurée par André Malraux après la dernière guerre, vestiges de la chapelle St Jacques...
Mr Parou nous ramène chez lui où nous dégustons les produits-maisons:apéritif aux    pêches, soupe aux légumes du potager,boudins blancs maison, fromages fermiers et fraises de la serre, le tout arrosé d'un vin de Loire des Pèlerins. Conversation sur la politique agricole, l'évolution de l'agriculture en Beauce, l'Eglise en France...
De belles chambres et une salle de bain mises à notre disposition. Quel superbe accueil nous est offert pour nous soutenir dans notre démarche.

Après un bon petit déjeuner où les premières cerises à peine cueillies sont appréciées, nous rejoignons en voiture le bord de Loire pour suivre le fleuve sur 30,5km jusque Beaugency d'où nous gagnerons l'Auberge de jeunesse deux Km au nord...Magnifique sente blanche,piste cyclable goudronnée, superbes demeures dont les jardins fleuris et arborés dévalent jusqu'au fleuve, pique-nique au bord d'un étang squatté par des castors et des tortues, cygnes majestueux,hérons ,canards, ...joggeurs,vtt,cyclistes anglais, hollandais,promeneurs du dimanche...
Meung-sur-Loire,la belle petite cité se dessine derrière les saules et puis se dévoile paisible en bord de Loire. On pense à la profonde confiance en l'humanité et en Dieu du poète maudit F. Villon se penchant sur son passé du fond de sa prison:
      Frères humains qui après nous vivez
N'ayez les cœurs contre nous endurcis,
Car, se pitié de nous pauvres avez,
Dieu en aura plus tost de vous merciz.
Vous nous voyez cy attachez cinq, six
Quant de la chair, que trop avons nourrie,
Elle est pieça devoree et pourrie,
Et nous les os, devenons cendre et pouldre.
De nostre mal personne ne s'en rie :
Mais priez Dieu que tous nous vueille absouldre!



...trop de belles distractions qui nous devient du droit chemin...Une voie sans issue nous rallonge la route de 3 km et c'est épuisés,sous une pluie battante que nous grimpons les derniers km. Nous nous contenterons cette fois d'une petite assiette à réchauffer au micro-onde avant de nous endormir avec notre hollandais dans des lits superposés!

Johan,voulant grouper deux étapes pour être certain de respecter la promesse faite à sa femme de rentrer le 1er août en Hollande, nous quitte,fort ému, après le petit-déjeuner. Nous envoyons quelques mails, achetons du pain à Beaugency et reprenons les bords de Loire principalement sur une longue levée qui nous mène à Suèvres.

Mr.Breton de La Bouzie,  appelé du banc devant l'église St Christophe , vient nous prendre 10min. plus tard. avec sa petite fourgonnette. Assise à l'arrière sur les caisses d'asperges, je l'entends se plaindre à Michel de l'impact de la météo des dernières semaines sur ses cultures. Accueil énergique et souriant de la fermière Suzanne,lessive et séchoir, asperges vertes cuites à point par le patron et dégustées avec les doigts trempées dans de la crème fraîche aigre,saucisses grillées et purée de la patronne...Les élections européennes tirant vers la droite, la dérive de la France sans visionnaire désintéressé,le coût de la mains œuvre et la concurrence déloyale d'autres pays,les subsides européens à l'agriculture,... les enfants et les petits-enfants...quel avenir pour eux? Une superbe rencontre avec un couple de chrétiens partageant depuis quarante ans le travail à la ferme et de multiples engagements dont des rencontres de couples chrétiens en monde rural et le catéchisme,la chorale et le conseil municipal pour  Madame Breton...Ils nous offrent gentiment le repas dans leur Accueil paysan. Bravo à cette belle France de la terre pour ses valeurs humaines et chrétiennes dont celle de l'hospitalité ! Sans cela,la route perdrait sa saveur et deviendrait une marche sportive et culturelle bien pénible  à poursuivre avec la carapace vissée sur le dos et la famille si loin.

Demain, nous retrouverons notre ami Guy de Montbéliard,retardé par des fuites de gaz dans son train venu de Dijon.



"L'aventure commence à l'aurore ,à l'aurore de chaque matin, l'aventure c'est le trésor que l'on découvre à chaque matin..." (J,Brel). Suzanne nous  dépose sur la place de Suèvres où...Guy débouche d'une ruelle, descendu  du train un quart d'heure plus tôt.
Après avoir acheté une baguette,nous empruntons une petite rue bordée de potagers en échangeant les dernières nouvelles, tout heureux de ces belles retrouvailles. Un cycliste,le panier rempli de belles Batavias, nous aborde pour parler du Chemin fait en 2005 avec son épouse aujourd'hui décédée ...Maintenant, il s'occupe...Il est maire de Suèvres par esprit citoyen. Que c'est beau!

Superbe piste jusque Blois aux accotements herbeux en cours de tonte, longs murs  de pierre assaillis de rosiers grimpants parfumés cachant d'élégants petits châteaux ,bancs et belles trouées sur les îlots sablonneux de la Loire sauvage...
À Blois, nous grimpons jusqu'à la cathédrale St Louis,admirons le petit jardin aromatique et l'odoriférante roseraie du Jardin de l'évêché. Michel accablé par une douleur au pied gauche nous attend sur un banc tandis que nous partons admirer la belle façade du château des comtes de Blois, devenue demeure royale de Louis XII et remise au goût de la Renaissance par François Ier...Nous pourrons faire tamponner notre credenciale à l'Office du tourisme avant d'aller boire un verre à trois chez un caviste heureux de diffuser soudain  "Le plat pays" ...Comment qu'il sait???
Nous traversons ensuite les belles ogives du Pont Gabriel qui nous conduit chez Mr et Mme Morin,amis des Parou, qui nous attendent en toute simplicité dans leur maison pour une belle soirée d'échanges sur ce qui nous fait vivre...autour d'une table conviviale.

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